Le chemin de mon coeur


Voilà deux ans et demi que j’habite mon quartier. Souvent, lorsque je rentre tard la semaine, je croise un gardien de nuit un peu trop frivole qui surveille un bâtiment à deux pas de mon immeuble.
Sauf que voilà deux ans et demi que ce monomaniaque répète inlassablement la même réplique, euh chéri c’est fini les Pokemons.
Je n’en peux plus ! Il me rend agressive.
Il y a deux ans, alors que je rentrais chez moi, embrumée par quelques bulles, une voix m’interpelle :
- « Madmoizelle, Madmoizelle, excusez moi, vous connaissez un peu le quartier ? »
Zélée, je lui réponds que oui. Il fait quelques pas, style j’ai une jambe de bois, et me dit :
« Quel est le chemin le plus court pour toucher ton cœur ? »
Oh my goddess, mais qu’est ce que c’est ringard, c’est tellement nul que j’en ai la nausée !! Le pire dans tout ça c’est que vu le nombre incalculable de soirées que j’ai pu faire en semaine, j’ai pu entendre cette phrase à chaque fois que je passais devant.

Un matin, sur le chemin du bureau j’aperçois la silhouette ennemie. Qu’est ce qu’il fait là, de bon matin, il ne cuve pas son panaché ? Remontée comme jamais je me prépare, prends mon souffle et d’un pas vif j’avance le plus rapidement possible pour l’éviter. Et là j’entends une nouvelle variante, vous savez l’espèce de bruit insupportable, on croirait qu’ils ont un morceau de gigot entre les dents et qu’ils essayent de l’aspirer. A court de réplique qui tue, je lui expose fièrement mon majeur. Sauf que pauvre de moi, ce n’était pas lui et, effectivement, ce rustique ne devait pas être passé par la case brossage de dents et dégageait quelque reste de sandwich paté-cornichons pris au café d’en face. La honte, ma victime a cru que j’étais une folle furieuse atteinte du syndrome de Gilles de la Tourette.

Quelques semaines plus tard c’était encore lui, alors je lui ai demandé pourquoi il répétait toujours la même phrase, vu sa tronche de cake au raisin il ne doit pas avoir beaucoup de succès. Mais robotique, il continue son monologue pour impressionner les deux autres péquenauds qui l’accompagnaient ébahis face à sa science des femmes.

Résultat hier soir je passe devant, et me fais encore surprendre par cette question inutile mais là je me retourne.
Il me demande :
- « Quel est le chemin le plus court pour atteindre ton cœur ?»
Comme c’est original, alors je fais volte face et lui envoie :
- « Dans ton cul au fond à droite, mais bien profondément » et je me suis sauvée inondée d’insultes!
Qu’est ce que je peux être subtile parfois !

Aucun commentaire: